Frappez et dites: «On est volontaire pour François Hollande»

Alexandre, 31 ans, en costume, arrive en retard, s'excuse: «J'ai couru». Il est «sympathisant», pas «adhérent» ou alors «par intermittence». «Je veux participer à la campagne de terrain», dit-il à la petite assemblée de militants. «Encore plus depuis quelques jours».

On est à une réunion de la section PS du XIIe arrondissement de Paris, le soir de la mort à Toulouse de Mohamed Merah. Il n'y a pas que des fidèles ou des habitués. D'autres participants font savoir qu'ils ne sont pas encartés. Ils viennent pour apprendre à faire du porte-à-porte, l'une des armes d'une campagne de terrain inspirée d'Obama. Le PS espère que 5 millions de portes s'ouvriront après le «toc-toc» de 150000 volontaires répartis dans tout le pays. Dans le XIIe, un arrondissement qui compte 87000 inscrits, les socialistes ont déjà frappé à plus de 2000 portes, et 900 se sont ouvertes.

Oscar, Bastien, Claude, Françoise, Cyril... Ils ont plus d'une dizaine face à Catherine Baratti-Elbaz qui assure la formation du parfait petit toqueur socialiste. Même les vieux routiers ont besoin d'un mode d'emploi. «La campagne rentre dans une nouvelle phase, avec l'égalité du temps de parole, le porte-à-porte devient encore plus important, explique -t-elle. Et puis avec les événements de Toulouse, la campagne prend un tour différent. On va avoir besoin de parler. La campagne a été mise entre parenthèses, mais il faut repartir. Et on a besoin de ce contact direct avec les électeurs.»

Les électeurs, mais pas n'importe lesquels. Il faut dégoter les abstentionnistes de gauche. C'est «la cible prioritaire». «Donc, on ne se dit pas: "Tiens, tiens, un bâtiment, la porte d'entrée est ouverte, si on y allait?"», complète Monique Leblanc, membre du bureau fédéral, qui espère pouvoir compter sur 300 volontaires dans l'arrondissement. «Certains habitants, si on en va pas toquer à leur porte, on ne les voit jamais.» L'analyse des scrutins a été faite bureau de vote par bureau de vote. «Pas de débat politique interminable sur le palier». Le temps est compté. Pour quelqu'un qui n'est pas dans la cible: moins de deux minutes. «"Au revoir", on est poli, mais on ne s'attarde pas». «Si c'est un sympathisant, vous pouvez y passer cinq minutes.»

«On ne vous lâche pas comme ça dans la nature»

Les volontaires y vont par deux. C'est la règle. Si possible, un homme et une femme, avec badges, autocollants, tracts. «Ouf, je n'irai pas seul», souffle un participant, apparemment soulagé. «On ne vous lâche pas comme ça dans la nature, il y a un expérimenté et un nouveau», rassure une militante. On distribue un imprimé de quatre pages de recommandations. «Au début, dites: "Je suis volontaire", conseille Catherine Barrati-Elbaz. Moi, on me demande souvent si je fais ça bénévolement. Il faut leur dire qu'on le fait parce qu'on y croit...»

Pour informer sur le programme, il y a «du matériel» qu'on peut glisser dans la main des habitants. Aguerrie, Catherine Barrati-Elbaz rassure les néophytes: «Pas besoin de connaître par cœur les propositions». Mais, glisse-t-elle, «c'est bien de dire pourquoi, vous, vous pensez que c'est le bon candidat».

Deux bénévoles tout frais s'essayent à un jeu de rôles. Que faire face à un sarkozyste, ou face à quelqu'un qui croit que «ça ne sert à rien»? Etre «correct», ne pas s'attarder. Un adhérent du PS s'interpose. «Moi je dirais: "Est-ce que vous permettez que je vous donne quelques propositions?" J'essaye de discuter». «Oh non, s'exclame une formatrice, il faut privilégier l'efficacité.» «Mais, je l'ai déjà fait, j'ai réussi.» On calme ses ardeurs. «Il faut essayer de voir si ce sont des indécis ou des désabusés de la parole politique», estime encore la formatrice. «Cela se fait aussi au feeling», assure Isabelle qui a déjà pratiqué le porte-à-porte dans le quartier.

Un autre couple se plie au jeu. Et s'entraîne à récupérer une procuration, un mail, un coup de main... L'un parlemente, l'autre prend des notes. «Il faut être progressif dans les questions, pas trop invasif: demander s'ils sont inscrits, s'ils iront voter, attirer leur attention sur le premier tour qui est pendant les vacances...Enfin tout dépendra de votre attitude, si vous êtes enthousiaste...»


Ce labourage par les forces militantes est «un atout dans cette dernière ligne droite à moins d'un mois du premier tour» rappellent les organisateurs de la session. Dans le XIIe, ils espèrent toucher 10000 électeurs.

Sources : http://www.liberation.fr/politiques/01012398351-frappez-et-dites-on-est-volontaire-pour-francois-hollande